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AVAL des Urgences : une nouvelle maladie nosocomiale
Un problème dénoncé depuis plus de 10 ans
Les alertes des professionnels de l’urgence sur la surcharge des structures d’urgence liées aux difficultés d’aval datent de plus de 10 ans. Déjà, en 2013, afin d’être entendu par la ministre Marisol TOURAINE, Samu-Urgences de France avait lancé un mouvement « l’appel du 15 octobre 2013 : les urgences arrêtent de chercher des lits d’hospitalisation ».
En 2019, la SFMU alertait la ministre Agnès BUZYN en s’appuyant sur des données de publications scientifiques internationales démontrant la surmortalité hospitalière liée à l’« overcrowding des urgences » : plus de 9% pour les patients « toutes pathologies confondues » et plus de 30% pour les patients les plus fragiles.
En décembre 2022, SUdF lance un nouveau signal à son ministre François BRAUN avec le dénombrement du No DEAD, consistant à déclarer les morts inattendues dans les couloirs des urgences, nouvelle façon de démontrer la dangerosité de la situation. En 2023, SUdF lance un mouvement de grève « zéro brancard dans nos couloirs », incitant les SU a travailler de manière sécuritaire, consistant à accueillir dans leurs locaux un nombre de patient en adéquation avec leur capacité d’accueil.
Les couloirs des urgences devenus dangereux, sont à l’origine d’un équivalent de maladie nosocomiale
La situation dans nos structures d’urgences s’est très nettement dégradée depuis 2022. Les conditions d’exercice aux urgences du fait de l’absence de disponibilité de lits d’hospitalisation sont à l’origine d’une maltraitance inégalée, aboutissant même à une réelle dangerosité en particulier pour nos patients âgés. La stagnation de ces patients dans les couloirs des services du fait de l’insuffisance de fluidité d’aval des urgences est une source curable de mortalité et surtout évitable.
La preuve scientifique de cette surmortalité a été apportée par une étude menée fin 2022 dans 92 structures d’urgences par les équipes de l’Inserm, de Sorbonne Université. Ce travail a démontré que le risque de mortalité intrahospitalière est accrue de 39% lorsqu’un patient âgé passe une nuit sur un brancard aux urgences. Cette mortalité évitable s’apparente à une véritable maladie nosocomiale dès lors qu’elle est connue, démontrée et qu’aucune mesure n’est prise pour l’éviter.
Première cause de pénibilité et de perte d’attractivité pour les professionnels
Par ailleurs, l’encombrement des urgences du fait de la stagnation des patients en lien avec l’absence de lits d’hospitalisation disponibles reste la première cause de pénibilité pour les professionnels des urgences associée à une perte d’attractivité pour la spécialité de Médecine d’Urgence. Cela a été mis en évidence dans plusieurs travaux. La prise en charge, au sein des urgences, de patients relevant d’une hospitalisation génère une charge en soins supplémentaire pour les personnels de nature à altérer la qualité des soins. Les conditions d’accueil et de prise en charge dégradées viennent percuter les valeurs professionnelles de nos soignants. Il n’est pas éthiquement acceptable de fermer les yeux sur une mortalité évitable. Le retour à un mode de fonctionnement fluide permettant de recentrer les services d’urgences sur leur mission d’accueil des patients requérant des soins urgents et les professionnels sur leur cœur de métier représente un enjeu majeur d’attractivité. Les SU doivent redevenir des services de « flux » et non des services d’hospitalisation, le cumul est impossible.
Un sujet oublié dans les discours de l’Etat
En janvier 2023, le Président de la République annonçait vouloir désengorger tous nos services d’urgences d’ici la fin de l’année 2024. Pour autant, depuis, aucune mesure n’a été prise ou annoncée pour fluidifier l’aval des urgences à l’exception de réouvertures de lits non constatées sur le terrain. Aucun discours n’a soulevé ce sujet ni ceux des ministres de la santé, ni même celui du Premier Ministre le 30 janvier 2024 lors de son discours de politique générale.
Une action ministérielle sans résultat
De multiples rapports, la mesure 12 du pacte de refondation des urgences porté par Mme BUZIN, plusieurs circulaires et instructions (anticipation des tensions liées aux hospitalisations non-programmées, dispositifs de gestion des lits, admissions directes non programmées des personnes âgées…) ont tenté d’améliorer la situation. Plusieurs centaines de millions d’euros ont été alloués aux ARS dans ce cadre depuis 2021. Pourtant, aucune amélioration n’est constatée sur le terrain, au contraire la situation s’aggrave de jour en jour.
SUdF propose de :
- déclarer la fluidité de l’aval des urgences grande cause nationale hospitalière,
- arrêter le financement incitatif tel que réalisé depuis 2021,
- déployer les mesures de fluidification de l’aval des urgences telles que préconisées par l’ANAP,
- privilégier l’ouverture de lits d’hospitalisation complète de médecine polyvalente,
- créer une spécialité de médecine polyvalente hospitalière,
- engager une politique de transparence et de financement au résultat :
- imposer en lien avec les travaux de la FEDORU la mise en place d’indicateurs de résultat,
- publier quotidiennement à 8h le nombre de patients sur un brancard en attente d’un lit d’hospitalisation dans chaque SU,
- intégrer des objectifs de fluidité des SU dans la liste des indicateurs obligatoires pour l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins utilisés pour le calcul du montant de la dotation allouée aux établissements de santé en application de l’article L. 162-23-15 (IFAQ).